28ème Dimanche Temps ordinaire Année C

Lc 17, 11-19

La foi qui guérit, celle qui sauve

Par le Père Pierre ABRY,    

     Certes, la lèpre a disparu sous nos latitudes, mais le péché dont elle est le symbole poursuit son œuvre de corruption en notre chair. La lèpre réduit l’homme à un paria, un intouchable, coupé de la communauté et impropre au culte, à la louange. Ainsi du péché qui enferme, isole et consume. Il n’est pas une infraction à un code moral, mais une rupture de la juste relation à soi, à l’autre, à Dieu, qui nous fait, selon le sens hébraïque du mot, « manquer la cible », le but de notre vie. Dans la laideur de la condition de pécheur, il n’y a plus de distinction entre les neuf juifs et le samaritain hérétique, entre bon croyant, mal croyant ou non croyant.

     Jésus envoie donc les dix lépreux « se montrer au prêtre » pour faire constater, selon la loi mosaïque, une guérison qui n’est pas encore advenue ! Dans cette obéissance concrète à la Parole, pas à pas, la guérison advient. « Tout ce que vous demandez en priant, croyez que vous l’avez déjà reçu, et cela vous sera accordé. » (Mc 11,24) Cette foi qui guérit, le Seigneur en fait l’éloge chez le centurion païen qui demande le rétablissement de son enfant : « En vérité je vous le dis, chez personne je n’ai trouvé une telle foi en Israël ! » (Mt 8,10)

     Cependant, seul le samaritain « revient sur ses pas en glorifiant Dieu à haute voix et tombe face contre terre aux pieds de Jésus, en le remerciant. » L’homme, prompt à demander dans la détresse, est hélas aussi prompt à oublier l’auteur du bienfait une fois exaucé. Au samaritain seul est créditée la foi qui sauve. Elle conduit, par delà la guérison, à une réelle résurrection : « Relève-toi, va ; ta foi t‘a sauvé. » Le bien reçu conduit à la reconnaissance et par elle, à la véritable connaissance du Dieu bon et vivifiant. « La vie éternelle, c’est qu’ils te connaissent, toi, le seul véritable Dieu, et celui que tu as envoyé, Jésus-Christ. » (Jn 17,3) Irénée de Lyon synthétise en cette belle sentence : « La gloire de Dieu c’est l’homme vivant, debout ; la vie de l’homme, c’est de contempler Dieu. »

     L’eucharistie dominicale est, pour les lépreux que nous sommes, une rencontre avec le Christ vivifiant. Elle s’ouvre sur l’imploration Kyrie eleison : « Seigneur, dans tes entrailles de miséricorde, prends pitié, réengendre-moi ! » Puis, le Christ lui-même s’adresse à nous dans la liturgie de la Parole. Sa parole est chemin de guérison. Nous y revenons sur nos pas, revisitons notre histoire, le chemin parcouru, à la lumière de la Parole proclamée. Ce cheminement conduit à l’exultation et à l’action de grâce, signification même du mot eucharistie. Chaque eucharistie est une résurrection. Être sauvé, c’est entrer dans cette allégresse eucharistique, dans la connaissance aimante du Seigneur, passer de la foi qui guérit, à la foi confessante, à la foi qui sauve.

 

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