16ème Dimanche Temps ordinaire Année B

Mc 6, 30-34

Vacance ou vacances ?

Par le Père Pierre ABRY,

       Rien de commun entre les rives du lac de Galilée au temps de Jésus et un presbytère de nos jours, si ce n’est peut-être que, comme dans une ruche, « les arrivants et les les partants étaient si nombreux qu’on n’avait pas même le temps de manger. » Entendre une parole nouvelle, arracher une guérison, être libéré d’un démon, manger le pain multiplié, tous veulent quelque chose ; chacun repart comblé, au-delà de la mesure de sa foi.

       Jésus ne résiste pas. Il se livre jusqu’à l’exténuement physique. Comme un pain, il se laisse manger jusqu’à la dernière miette. Plus encore, il ne juge ni ne méprise l’intention et l’attitude intéressée des foules. Au contraire, « saisi aux entrailles, il les enseigne longuement. » Bien entendu, de tous ces gens avides de recevoir, il ne restera personne à l’heure des ténèbres, de la passion. Pas même un chien n’aboiera pour clamer son innocence. Unanime, la foule versatile vocifèrera : « Crucifie-le ! » « Il a été transpercé à cause de nos crimes, écrasé à cause de nos fautes… Tous, comme des moutons, nous étions errants, chacun suivant son propre chemin… Parmi ses contemporains, qui s’est inquiété qu’il ait été retranché de la terre des vivants, qu’il ait été frappé pour le crime de son peuple ? » (Is 53,5.6.8.) Livré dans sa vie comme dans sa mort, il n’a pas résisté à ceux qui quémandaient de la vie ou la lui enlevaient. Donnant, pardonnant, il est le Bon Pasteur, ému aux entrailles envers les hommes, « parce qu’ils sont comme des brebis sans berger. »

       Pasteur, Jésus l’est aussi de ses apôtres, envoyés deux à deux « comme des agneaux au milieu des loups. » (Lc 10,3) A leur retour de mission, il les invite : « Venez à l’écart dans un endroit désert, et reposez-vous un peu. » Là, « réunis autour de Jésus, ils lui rapportent tout ce qu’ils ont fait et enseigné. » L’été est un temps à la vacance, pour laisser vacante notre place habituelle. Pour beaucoup, évasion et divertissement seront d’autant plus débridés que confinements et couvre-feu avaient contraints de rester sagement chez soi. Si, partant en vacance nous laissons vacante notre place, c’est afin de pouvoir faire le « vacuum », le vide en nous-mêmes, trouver le repos intérieur. L’endroit désert » n’est pas nécessairement géographique, ni synonyme d’isolement. Il est ce lieu qui nous est propre, celui de l’intériorité, où Christ nous est présent. L’environnement « multitâche » de la civilisation moderne, qualifié par Bernanos de « conspiration universelle contre toute espèce de vie intérieure » nous fait trop souvent déserter ce « lieu à l’écart ». Voici venu le temps du remède… Faire le vide, pour mieux faire le plein, plutôt que du remplissage…