4ème Dimanche de carême Année C

Lc 15, 1-32

Un Père, deux fils et trois portes

Par le Père Pierre ABRY,


Lorsque nous l’appelons « parabole du fils prodigue », immédiatement notre attention se focalise sur le jeune rebelle, auquel nous cherchons, sans trop de mal à nous identifier, fermant ainsi les vastes horizons de sens qu’ouvre la Parole.

    « Un homme avait deux fils », contestataires et revendicateurs, tous deux immatures dans la relation à leur père. Le plus jeune prend la porte avec sa part d’ héritage, pour vivre dans l’éloignement du père. L’aîné, tout en semblant demeurer dans la maison du père, se révélera lui aussi être à l’extérieur. Retournant des champs où il pensait accomplir la volonté du Père, il refusera de franchir la porte de la communion avec le père et le frère revenu. Le père enfin, franchit inlassablement la porte pour sortir à la rencontre de ses fils. Deux portes donc, celle de l’orgueil pour sortir et celle de l’humble conversion pour rentrer, et plus profondément la troisième, celle de l’intériorité que trouve le prodigue, « rentrant en lui-même ». Sans elle, tout n’est que mouvement de surface.

    Nous nous retrouvons alternativement dans l’un ou l’autre fils et entendons l’appel à la conversion ; mais entendons aussi l’appel à exercer une véritable paternité de miséricorde envers ceux qui nous sont confiés, appel à sortir de nous-mêmes après y être entrés. Comment telle conversion et telle paternité peuvent-elles advenir ?

    En son Fils Unique, le Père du ciel passe sans cesse la porte à la rencontre de l’homme rebelle. Le Fils Unique s’est fait le prodigue de la parabole, semblable à nous en notre terre lointaine du Père. Il y est venu, non pour dilapider l’héritage, mais pour nous assumer, se charger du péché qui nous sépare de Dieu, et nous reconduire à la communion avec son Père et notre Père. En lui nous sommes revêtus de la « première robe », une chair transparente à l’Esprit, le vêtement lumineux qu’en péchant, Adam avait troqué pour une tunique de peau opaque. Le Fils Unique s’est fait aussi l’aîné de la parabole, le seul qui puisse dire en vérité : « Je te sers sans avoir jamais transgressé un seul de tes ordres. » Par son obéissance il est devenu « l’aîné d’une multitude de frères » dans sa résurrection.

    Pour nous le fils Unique est devenu la porte. « Si quelqu’un entre par moi, il sera sauvé. » (Jn 10,9) Cette porte de la miséricorde nous est ouverte largement durant l’année jubilaire de la miséricorde. Nous la franchirons ensemble, en pèlerinage, le dimanche de la miséricorde, fête de notre Communauté de paroisses.