Dimanche des Rameaux – Année B

28/03/2015

Passion selon Saint Marc 14, 1 – 15,47

 

« Mise à nu »

       

      Chaque récit de la passion présente ses notes propres. Marc nous livre un détail autobiographique au moment de l’arrestation de Jésus : «L’abandonnant, ils prirent tous la fuite. Un jeune homme le suivait, n’ayant pour tout vêtement qu’un drap, et on le saisit ; mais lui, lâchant le drap, s’enfuit tout nu. » (Mc 14, 51s)

      Le prophète Amos déjà, annonçant le jour terrifiant du jugement d’Israël et des nations, disait : « Le plus courageux d’entre les braves s’enfuira nu, en ce jour-là, oracle du Seigneur. » (Am 2, 16) Par de-là le dépouillement physique, comprenons que la Passion met l’homme à nu, qu’elle dévoile le secret des cœurs, le fond inconsistant de l’homme. Jésus, lui aussi, sera mis à nu, pour être crucifié, dévoilant le fond de l’être de Dieu, l’amour absolu, la donation totale de lui-même et l’accueil inconditionnel du pécheur : « Père, pardonne-leur : ils ne savent ce qu’ils font. » (Lc 23, 34) Le jour terrible du jugement de Dieu sur la nudité de l’homme pécheur a consisté en la mise à nu de Sa miséricorde.

      Plus profondément encore, notre nudité est figure du dépouillement de la mort : « Nu, je suis sorti du sein maternel, nu, j’y retournerai. » (Job 1, 21) Dans la Genèse, cette nudité ne posait aucun problème à l’homme en communion avec Dieu, dont il est l’image et la ressemblance. « Tous deux étaient nus, l’homme et sa femme, et ils n’avaient pas honte l’un devant l’autre. » (Gn 2, 25) Mais lorsqu’ils se coupent de la source de leur vie, « leurs yeux à tous deux s’ouvrirent et ils connurent qu’ils étaient nus ; il cousirent des feuilles de figuier et se firent des pagnes. » (Gn 3, 7) Par le péché, l’homme a tué Dieu dans son cœur et expulsé Dieu de sa création. Il connaît désormais une mort intérieure terrifiante, le vide, l’inconsistance de son être. C’est cette expérience de non-être qui rend la mort physique mortelle. Alors que dans la création tout passe continuellement de la mort à la vie, pour l’homme seul, la mort physique semble la fin de tout, une fin inacceptable.

      Dans la passion, la nudité de notre être est mise au jour. Dans la résurrection du Seigneur, c’est notre chair, « pagne de feuilles de figuier », « tunique de peau » (Gn 3, 7 ; 3, 21), assumée dans sa nudité par le Christ qui est vivifiée par l’Esprit. Dans la Pentecôte, ce même Esprit vivifiant est répandu en nos cœurs, afin que nous vivions en ressuscités. Par cette Semaine Sainte, entrons dans le mystère de notre Pâque.

 

 

Pierre ABRY, curé