Épiphanie – Baptême du Seigneur

La vie baptismale, épiphanie du chrétien

Par le Père Pierre ABRY,

   L’Épiphanie, « manifestation », conjugue dans la tradition orientale trois révélations du Christ : celle aux nations païennes dans la figure des mages ; celle à Israël lors du baptême dans le Jourdain ; celle à ses disciples aux noces de Cana, lorsque changeant l’eau en vin, il accomplit son premier signe, « manifestant sa gloire à ses disciples qui crûrent en lui. » (Jn 2,11)

   Nous avons célébré avec ferveur la Nativité et l’avons prolongée dans l’octave ; la solennité de la Mère de Dieu nous a fait entrer dans l’année nouvelle ; à l’Épiphanie, avec les mages des nations païennes, dont nous sommes, nous adorerons l’enfant de la crèche. Le lendemain, la fête du baptême du Seigneur sera comme escamotée par les aléas du calendrier ; nous serons déjà entrés dans le temps ordinaire. Or, c’est précisément là que se joue l’épiphanie, la manifestation du Christ : dans notre vie baptismale ordinaire.

   Au baptême de Jésus commence véritablement son épiphanie, sa manifestation. L’Esprit Saint descend sur Lui et la voix du Père se fait entendre : « Celui-ci est mon Fils bien-aimé en qui j’ai mis tout mon amour. » Certes, le verbe s’est fait chair à la Nativité, mais prendre chair est bien plus qu’assumer un organisme. La parole entendue au baptême, l’Esprit manifesté, doivent prendre corps, s’inscrire dans l’histoire. Jésus rend visible, dans une vie d’homme, l’amour du Père pour les hommes, la manière divine d’être homme.

   En chaque instant reçu du Père et vécu en relation avec lui, en chaque rencontre, devant chaque infirmité et tourment de l’âme ou du corps, Jésus donne corps à l’amour du Père pour l’homme. L’épiphanie commencée au baptême devient claire manifestation lorsque Jésus, plongé non plus dans les eaux du Jourdain, mais dans celles de la mort, portera l’amour pour le Père et les hommes à sa plus parfaite expression. L’amour du Père pour l’homme pécheur sera pleinement manifesté dans le Christ, lorsqu’au troisième jour, l’Esprit vivifiant arrachera le Fils aux eaux de la mort, comme un ressuscité.

    Le baptême du Christ est signe du nôtre. Comment une simple immersion suffirait-elle à faire de nous des fils de Dieu ? « Dès maintenant, nous sommes enfants de Dieu, mais ce que nous serons n’a pas encore été manifesté. » (1Jn 3,2) La grâce reçue dans l’immersion baptismale attend son épiphanie, sa manifestation, son déploiement en une vie baptismale. Nos familles, et l’Église elle même, à l’image de la famille de Nazareth sont le lieu de croissance et de déploiement de cette vie filiale.